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05/11/2007

Enfin une réponse de l'ANR (16 octobre 2007)

39e3b4d20b4c7764fe353bdd5baa0be1.jpgPar un courrier daté du 16 octobre 2007, plus de 3 mois après la décision prise, par l’ANR, de ne pas financer le projet Dieu Change à Paris (DCP), le refus a été enfin notifié.

Sur 1406 projets soumis, seuls 353 ont été acceptés (1 sur 4).

DCP faisait partie des 3 sur 4 non-retenus.

Pour télécharger le commentaire du comité d’évaluation, cliquez ici:

Pour télécharger la liste du comité d'évaluation Sciences Humaines 2007, cliquer ici:

Pour aller plus loin, si vous souhaitez un « commentaire sur le commentaire », cliquez ci-dessous.


Commentaire du commentaire (par S.Fath, ex-coordinateur du projet déposé)

Sur le fond, le projet est reconnu comme «neuf et «très ambitieux», mais aussi comme «très intéressant». Il est rassurant de constater que le créneau choisi est ainsi légitimé, à la fois dans son caractère novateur et dans son intérêt intrinsèque.

Mais deux critiques sont ensuite formulées, et développées.


1/ Le projet devrait être «plus resserré»

L’immensité du travail à mener suscite la «perplexité». Je conçois en effet que l’anbition du projet était grande. Mais c’est précisément pour celà que nous nous étions adressés à l’ANR! L’ANR est devenue aujourd’hui le juge de paix, le principal pourvoyeur financier des recherches à mener. Si l’ANR elle-même ne se sent pas de taille à financer un projet comme «Dieu change à Paris», qui le fera?
Le dernier paragraphe revient sur ce grief, en trouvant le projet « trop émietté » (de nombreux terrains). Mais le comité scientifique d’évaluation a-t-il bien réalisé combien le terrain religieux parisien est lui-aussi «trop émietté»?
Oui, ce n’est plus le Paris catholique du début du XXe siècle. Faut-il pour cela refuser d’étudier le Paris religieux du XXIe siècle, car  «trop émietté»?
La crainte formulée au sujet du nombre de doctorants, le nombre d’opérations est certes compréhensible, mais les quatre partenaires prévus, à commencer par le GSRL, avaient, selon toute probabilité, les reins assez solides.
Je rappelle que le GSRL est le premier labo de France en sciences sociales des religions par le nombre de chercheurs et de doctorants, et que de tous les noms de doctorants collaborateurs mentionnés dans le projet DCP, aucun n’est «bidon»: nous avions sous la main des équipes prêtes à enquêter, et d’ailleurs, certaines ont commencé malgré tout à enquêter (religion chinoise à Paris), malgré l’abandon du projet par l’ANR.
Autre remarque : dire que «les chercheurs (…) sont pour beaucoup impliqués de façon très marginale» est sans doute une plaisanterie, ou plutôt une ignorance : le chiffrage du temps consacré par chaque chercheur a été effectué en s’appuyant sur l’exemple de projets ANR sélectionnés l’année précédente. Notre chiffrage était cohérent.


2/ Le projet devrait être «mieux explicité dans ses étapes et dans ses méthodes de travail»


Ce second reproche est présenté comme secondaire, car «le contenu scientifique» est jugé «pertinent dans l’ensemble». Mais on a néanmoins tenté de l’étayer par des exemples, que voici:

-prévoir une approche institutionnelle plus précise; certes, c’est intéressant, et ce n’était pas totalement écarté du projet (cf. l’axe sur les mutations du catholicisme de l’ère Lustiger), mais ce n’était pas l’angle choisi: un projet de recherche repose par définition sur un périmètre, et celui-ci insistait non pas la structuration interne des groupes étudiés, mais sur leurs relations avec le tissu social parisien, et les enjeux que cela pose en termes de laïcité.


-«prise en compte du protestantisme traditionnel un peu négligée»: un reproche surprenant quand on considère que dans les neuf lignes consacrées explicitement au protestantisme est mentionné le rôle de la Fédération Protestante de France. Que par ailleurs l’accent porte sur les mutations, et que l’on n’y peut rien si les deux principales mutations sont la multiplication par 12 ou 13 des communautés évangéliques depuis 1945 en région parisienne et l’essor considérable des commuanutés de migrants; qu’enfin, si les lecteurs avaient lu la bibliographie, ils auraient vu qu’y figure le mémoire qu’Anne Dolffus a consacré aux paroisses réformées parisiennes: un terrain déjà bien balisé donc, au contraire des grandes mutations récentes que notre projet de recherche se devait d’étudier pour combler les lacunes du savoir.


-dans l’analyse spatiale, un reproche est également fait, dans une langue française incertaine que je simplifie pour vous chers internautes : il aurait fallu, si j’ai bien compris, mieux intégrer la question des échelles de fonctionnement de la vie métropolitaine dans l’enquête sur les religions. J’avoue que je ne comprends pas ce reproche, d'autant que le laboratoire Centre d’Histoire Sociale (CHS), partenaire de DCP, est parfaitement outillé pour problématiser la question religieuse à la lumière des politiques urbaines, lesquelles sont clairement articulées au projet.

-le manque de prise en compte de la question démographique; ce reproche-là je le conçois: il s’agit en effet d’une dimension que nous aurions pu expliciter davantage. Mais c’était périphérique par rapport à l’axe choisi, et surtout, cela aurait rajouté un volet supplémentaire à un projet déjà jugé trop ambitieux et trop large, ce qui est contradictoire.

En conclusion, je tire trois enseignements de ce commentaire du comité scientifique disciplinaire:

-une évaluation très tard venue: elle m’a été adressée (en courrier "urgent": gag involontaire?) plus de trois mois après la décision de (non)sélection. Qu'est-ce que cela aurait été si la réponse n'était pas "urgente"...

-une évaluation faite par des collègues non-spécialistes: aucun des membres du comité présidé par Françoise Lavocat (professeure de littérature comparée) n’est un chercheur spécialisé en sciences sociales des religions.
Ces collègues sont tous très compétents dans leur domaine, mais qu’il n’y ait pas, pour évaluer un projet ANR sur les religions, quelques spécialistes patentés d’histoire ou sociologie des religions, pose un problème de fond. Qui explique aussi pourquoi les évaluateurs pensent mal comprendre «les méthodes mises en œuvre».
-une évaluation opaque: ce commentaire d’une qualité décevante donne une curieuse impression d’opacité. Je n'irai pas jusqu'à affirmer qu'on a voulu, trois mois plus tard, bricoler une argumentation à peu près plausible, mais en «noyant le poisson», sans dévoiler l’arrière-plan qui permettrait de mieux comprendre la mise à l’écart... Mais un léger doute est permis au vu du retard de communication de l'avis, par ailleurs anonyme (anonymat nécessaire AVANT l'évaluation, mais plus après).


On est réduit, du coup, à des hypothèses, des questions sans réponses.
Comme je n’aime pas les sous-entendus, explicitons-les:

-Les préférences disciplinaires des membres du comité scientifiques conditionnent-elles en partie l’acceptation ou le rejet des projets?
Difficile à savoir, difficile d'écarter l'hypothèse. Que Françoise Lavocat, présidente nommée du Comité sectoriel Sciences Humaines, soit spécialiste de littérature comparée (c’est presque comme si un comité Biologie était dirigé par un économiste) n'est pas de nature à rassurer non plus, quelles que soient les grandes compétences de F.Lavocat dans son domaine.

 -Qu’en est-il des influences politiques ? Le comité scientifique qui évalue n’a pas de vraie légitimité démocratique. Il émane dans son intégralité du choix du président de l’ANR, lequel est nommé également «par le haut» dans la plus pure tradition monarchique.
Dès lors, c’est la porte ouverte à des décisions discrétionnaires, qu’on peut maquiller à loisir d’un baratin justificatif plus ou moins maladroit. Précision: je ne dis pas que tout le commentaire dont a fait l’objet le projet DCP relève de cela.


-La priorité de l’ANR est-elle de faire progresser la connaissance du réél
, des faits sociaux dans leur configuration actuelle, ou d’appuyer des priorités dictées par les politiques (ou autres), au gré des modes du moment? Les deux exigences peuvent certes se rejoindre… Ce n’est hélas pas toujours le cas.



Post-Scriptum important: -pour les courageux qui continuent à déposer des projets pour financement à l’ANR, SURTOUT éviter la grosse erreur que je reconnais bien volontiers avoir commise: par principe, j’avais refusé de suggérer des noms d’évaluateurs (préférant que juges et parties n’aient aucune relation).

Cet excès de scrupules était vraiment idiot de ma part. Si vous souhaitez être évalués par des spécialistes de votre discipline, surtout proposez des noms car sinon ce n'est pas garanti!

Si je l’avais fait, le sort ANR du projet DCP aurait peut-être été différent.

Commentaires

la mention de mon nom sur cette page est offensante et d'ailleurs mal informée; je n'ai évidemment pas évalué votre projet, et je n'ai absolument rien à voir dans le fait qu'il ait été rejeté.
Françoise Lavocat

Écrit par : Françoise Lavocat | 25/03/2010

Réponse à Françoise Lavocat

Si vous vous êtes sentie offensée je le regrette vivement: telle n'était pas l'intention.

Je suis bien persuadé de vos grandes compétences de spécialiste, que je ne remets nullement en cause.

Sur le fond, je maintiens en revanche, et en-dehors des questions de personne, qu'il est préférable, en sciences humaines, de nommer une ou un universitaire qui travaille directement dans le domaine des sciences humaines et sociales.

Je maintiens par ailleurs que vous étiez bel et bien présidente du comité sectoriel "Sciences Humaines et sociales" lors de l'évaluation de ce projet DCP http://dieuchangeaparis.hautetfort.com/media/02/02/4874e6cd2e1f6ff30432cb83e1718d1c.pdf .

Qu'à ce titre, vous n'ayiez pas directement évalué ce projet n'élimine pas le rôle indirect que vous avez joué au titre de votre présidence.

JE termine en soulignant que le seul élément rendu public sur les procédures d'évaluation a été le fameux comité sectoriel que vous avez présidé: si la liste des évaluateurs directs de ce projet ANR avait été donnée (ce qui aurait été à l'honneur de l'ANR, qui devrait favoriser la clarté des procédures), je me serais empressé d'ouvrir le débat avec eux plutôt qu'avec vous.

Mais faute de transparence, c'est votre seule responsabilité certes indirecte qui apparaît dans la lumière, pour une affaire qui est désormais, soulignons le, de "l'histoire ancienne".

Tournons la page et sans rancune.

Écrit par : SF | 25/03/2010

juste une remarque, tout de même, cher collègue: vous rendez-vous compte ce qu'a d'absurde la phrase suivante:

"Sur le fond, je maintiens en revanche, et en-dehors des questions de personne, qu'il est préférable, en sciences humaines, de nommer une ou un universitaire qui travaille directement dans le domaine des sciences humaines et sociales."

les comités reçoivent des dossiers de nombreuses disciplines appartenants aux sciences humaines, y compris les lettres, évidemment. Comment voulez vous que l'on nomme un président de LA discipline (laquelle ?) que vous jugez essentielle ?

Écrit par : Lavocat | 01/05/2010

Chère collègue,

Je ne vois pas où est l'absurdité dans mon propos.

Du point de vue (largement) majoritaire, les lettres NE FONT PAS PARTIE DES SCIENCES HUMAINES. La linguistique, à la rigueur, et encore cela peut se discuter.
Ce n'est pas un jugement de valeur, c'est simplement un constat. La littérature comparée, c'est passionnant et j'aime beaucoup (j'en ai beaucoup fait d'ailleurs : au moins 3 ans post-bac). Mais ce n'est pas une "science humaine" au sens courant du terme.

Du reste, l'Ecole Normale Supérieure de Lyon s'appelle "LSH" (Lettres, Sciences Humaines). On distingue, avec bon sens, ce qui relève des Lettres (littérature, philosophie) et ce qui relève des Sciences Humaines (Histoire, Géo, socio etc.).

Si l'ANR considère les lettres comme une science humaine, c'est une erreur, voire une imbécilité.

Il faut juger les disciplines en fonction de leur périmètre et de leur épistémologie propre.

Écrit par : SF | 01/05/2010

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