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14/06/2010

Eglise kabyle à Paris (compte-rendu réunion DCP n°7)

DSC05384_3.JPGNotre programme GSRL "Dieu Change à Paris" a tenu jeudi  10 juin 2010 sa 7e réunion de l'année universitaire.

Le thème de cette séance, animée par Fatiha Kaoues, doctorante au GSRL, était consacré à l’ Église évangélique kabyle à Paris, entre héritage musulman et conversion évangélique.

L'exposé, agréablement illustré par une projection Powerpoint et complété par un extrait vidéo, a été développé en trois étapes.



Missionnaires au Maghreb, un peu d'histoire

Fatiha Kaoues a commencé par contextualiser l'histoire missionnaire au Maghreb, en soulignant le lien partiel entre mission et colonisation. Durant la période coloniale, lorsqu'elles ont été favorisées (ce qui n'a pas été systématiquement le cas), les missions ont surtout été encouragées dans une perspective nationaliste.


Les missions catholiques françaises étaient avantagées, au contraire des missions anglaises (et les missions protestantes en général, soupçonnées d'accointances britanniques). Durant cette période s'est développé par ailleurs un véritable "mythe kabyle", fondé sur le particularisme réel ou supposé d'un peuple considéré comme très superficiellement islamisé : ce qui, par ricochet, faisait de la Kabylie un objectif missionnaire de choix, au nom d'un christianisme présenté comme un "retour aux vraies racines religieuses kabyles", anté-islamiques.
Au total, l'évangélisation en Kabylie n'a cependant guère eu d'impact durant la période coloniale : quelques centaines de conversions tout au plus.

 

 

Mission Rolland.jpg


L'Église évangélique kabyle de Paris

Fatiha Kaoues a ensuite ciblé son exposé sur l'Église évangélique kabyle de Paris, en soulignant, à la lumière des entretiens qu'elle a conduits, que le "mythe kabyle" a perduré. Il reste quelque chose aujourd'hui de la "figure idéale" du converti kabyle, façonnée par les missionnaires, autour de l'idée suivante : la conversion n'est pas une rupture, c'est un retour aux sources. L'Église évangélique kabyle qui se réunit actuellement (2010) dans les locaux de l'Église réformée de Pantin est animée par Messaoud Baadoui.


Elle réunirait environ 70 fidèles par semaine, tous convertis. Fatiha Kaoues souligne que l'explication en termes de repli communautariste est "un peu hâtive". Les convertis issus de l'islam sont certes sous le sceau d'une certaine rupture, mais ils revendiquent en même temps leur culture : ils l'assument, la défendent, et elle transparaît dans leur culte, aux accents algériens spécifiques. Leur intérêt régionaliste est doublé de revendications politiques (désir de liberté, de pluralisme). Il est si net qu'il paraît même, à la limite, pouvoir prendre le pas sur l'aspect religieux : "la conversion n'est pas une rupture mais plutôt une synthèse", affirme Fatiha Kaoues.


Le DVD, support d'évangélisation


Enfin, l'exposé a mis en lumière l'importance des supports audiovisuels, à commencer par la vidéo, disponible sur certains sites internet mais aussi en DVD. Ces DVDs sont explicitement conçus pour l'évangélisation. Ils scénarisent des conversions musulmanes au protestantisme évangélique, au travers de situations culturelles diverses (Indonésie, Afrique sub-saharienne etc.). Ils donnent une image assez répulsive et caricaturale de l'islam, que l'on retrouve aussi dans les récits de conversion.

Leurs accents sont sur l'édification, l'authenticité, la modification, l'aspect binaire, la sincérité. La "rencontre avec Jésus", au coeur du dispositif de conversion, s'effectue sous la forme de songes. Elle revêt une forte dimension mystique, confirmée par les entretiens. Le Coran, quant à lui, est dénoncé comme un livre falsifié, et l'islam est présentée comme une religion qui favorise la fausseté. Fatiha Kaoues relève cette ambiguité : dénonce-t-on les dérives de l'islam, ou l'islam lui-même ?


En conclusion provisoire de cet exposé passionnant (et trop brièvement résumé ici), Fatiha Kaoues a développé des scénarios de réaction possible du côté des acteurs musulmans confrontés à ces conversions évangéliques. Une hypothèse serait le repli et la réactivation de la thèse du complot; un autre scénario possible serait, pour les acteurs de l'islam, d'appréhender l'interpellation évangélique comme un défi, un moteur pour le changement, y compris en matière de pluralisme et de liberté individuelle.

L'échange avec l'auditoire a nourri de nombreuses pistes à poursuivre, notamment celle du poids des convertis musulmans au sein des réseaux évangéliques parisiens, ainsi que de l'enjeu de la visibilité architecturale dans la capitale francilienne (accès aux m2 cultuels).

Commentaires

Intéressant.

Écrit par : Vive les arabes | 14/06/2010

Très bonne et intéressante conférence
JB

Écrit par : jean boulègue | 14/06/2010

Les commentaires sont fermés.